Ars Cultura

    Bill François évoque dans son ouvrage Le Plus Grand Menu du Monde comment l’histoire de la civilisation est étroitement lié, selon lui, à celle… du blé. Il voit même en cette relation symbiotique la raison de l’avènement de la propriété privée, une vision naturaliste aux antipodes des dogmes idéologiques que les évolutionnistes ne renieraient pas.

    On oublie souvent en parlant des espèces qu’on consomme qu’on ne fait pas que les consommer : on les sélectionne, on les transforme et elles nous transforment aussi et c’est en cultivant le blé qu’on a créé la propriété privée sédentarisée. On peut voir cela comme un lien avec une espèce et nos civilisations occidentales se sont bâties sur le blé et on s’est sédentarisé. Alors on l’était un petit peu avant mais ça y a grandement participé car on a commencé à faire des greniers, à constituer des stocks agraires, et par ricochet à partir de là on a essayé de conquérir d’autres territoires.
    Ce qui est amusant c’est que d’autres civilisations se sont alliées avec d’autres plantes et ont d’autres histoires très différentes. Pour celles qui se sont alliées avec le riz, ça fait des histoires conquérantes similaires à la nôtre parce que c’est aussi une plante qu’on peut stocker, mais celles qui se sont alliées avec le manioc, par exemple en Amazonie (on a l’image que les Indiens d’Amazonie sont des chasseurs-cueilleurs mais en fait ce sont principalement des cultivateurs), la forêt amazonienne est une zone cultivée en grande partie, notamment de manioc. Et bien eux qui cultivaient le manioc le laissait sur pied (parce que c’est beaucoup plus simple) et comme il pousse sous la terre, on ne peut pas vraiment évaluer combien il y en a. Par conséquent : pas de propriété, pas d’impôts et pas besoin de faire des stocks, pas besoin d’amasser. Ils ont donc vécu sans ces concepts pendant des millénaires sans problème grâce au manioc.

    Son entretien fascinant avec Frédéric Taddéï peut être vu en intégralité sur YouTube : https://youtu.be/DIhqnFpFwrs?t=1711.